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 on se trimbale nos cœurs comme des boulets de chair. (ceridwen)

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Màel Burnett
Màel Burnett

Eastern Highlands

▷ ÂGE IRL : 28
▷ MESSAGES : 197
▷ INSCRIPTION : 09/04/2013
▷ LOCALISATION : qu'importe réellement, je ne suis jamais au même endroit.
▷ ÂGE : 46 ans.
▷ HUMEUR : déphasé.
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BURN. BURN. BURN.
On prend un enfant de deux ou trois ans, on le met dans un vase de porcelaine plus ou moins bizarre, sans couvercle et sans fond, pour que la tête et les pieds passent. Le jour on tient ce vase debout, la nuit on le couche pour que l’enfant puisse dormir. L’enfant grossit ainsi sans grandir, emplissant de sa chair comprimée et de ses os tordus les bossages du vase. Cette croissance en bouteille dure plusieurs années. A un moment donné, elle est irrémédiable.

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MessageSujet: on se trimbale nos cœurs comme des boulets de chair. (ceridwen)   on se trimbale nos cœurs comme des boulets de chair. (ceridwen) EmptyJeu 11 Avr - 20:42

Regarder, encore et toujours. Comme planté dans le sol, obnubilé par peu. L'hiver est tombé, l'hiver est arrivé un matin sans réellement prévenir, bien que son vent glacial laissait à présager de la neige. Les flocons s'écroulent avec finesse en ce jour, calmement, et nous sommes loin de la tempête que nous avons traversé il y a quelques jours. Je ne saurais dire combien de centimètres m'empêchent de voir la terre, mais surement assez pour en faire désespérer certain. D'ailleurs, même des lacs ont gelés, nous sommes passés devant bien des coins mystiques, tous avaient succombé à la vile tentation de cette saison plus que difficile. Seul, il est rare que l'on puisse tenir debout plus de quelques heures, surtout dans les terres du Nord. Mais à cinq, tout est différent, parait plus beau, et les paysages plus agréables à regarder. Ne plus se plaindre des méfaits d'un temps vicieux, jamais. Emmitouflé dans les vêtements qui me protègent de ses morsures, je tourne mon visage, cherchant des yeux celle qui doit à m'accompagner ce matin. A ne pas en douter, Arran, Greer et Senga doivent dormir comme des animaux en hibernation. Bien plus loin, se trouve la roulotte, et à chaque fois, elle m'arrache un sourire en coin de lèvres, un peu niais je dois l'avouer, si ce n'est crétin. Je suis bien trop avancé, et la manière de marcher de la cinquième roue qui arrive à nous tenir debout, est visiblement en train de souffrir le martyr. Une jeune femme aussi frêle n'apprécie pas forcément ces températures, mais le pire doit être qu'elle n'est pas aussi habituée. Dans le Sud, ils peuvent se vanter d'avoir un rayon de soleil dans la semaine, quant au Nord, il fait gris, sans cesse. C'est un manteau qui se pose sur nos peaux, nous garde comme peut nous jeter dans une tempête macabre. Pourquoi ne pas partir ? Peut-être parce que tout ceci est authentique, que c'est une manière de vivre dont je ne pourrais jamais complètement me plaindre, et qu'elle peut nous prouver que nous pouvons survivre face à des forces qui nous sont inconnues. Arborant un sourire, caché derrière un morceau de tissu, Ceri est vêtue un peu moins chaudement, non pas comme si elle se trouvait dévêtue, mais je parais comme un ours caché sous sa fourrure à ses côtés. Je l'ai décidé, je l'ai emmené dans mes idées, dans mes principes. Lui apprendre la chasse, lui murmurer que le tir à l'arc est accessible à qui le veut bien. Pourquoi pas elle ? Présentement, je suis convaincu qu'elle deviendra aussi douée que nous quatre réunis. Quand elle le décidera, quand elle le voudra, quand elle ne tremblera plus face à des bêtes qui pourtant peuvent paraitre inoffensives. C'est un début, un commencement certes maladroit, mais, je me sens plus ou moins responsable de sa survie, de ses façons de sourire, de voir les choses. Une part en moi, ne cesse de me répéter qu'elle n'est pas d'ici, que la rue, ce n'est qu'une vue de l'esprit pour elle. Quand est-ce qu'elle daignera me dire la vérité ? Je ne saurais le dire, même mes insinuations ne suffisent pas, alors tout comme Greer et sa curiosité, je ne fais qu'attendre. Je respecte ses choix, son passé doit rester là où il est pour le moment, comme le mien, comme ceux des bohémiens - bien qu'il soit plus concret, comment Arran a perdu ses doigts, comment Greer s'est retrouvée seule. Dire que je suis mécontent de l'avoir à mes côtés, serait mentir sans ménagement. Contre toute attente, elle provoque en moi quelque chose, une fascination étrange qui quand je me plonge dans ses yeux verts, me poussent à croire en l'existence d'une éternité lumineuse. Je dois être niais, un peu stupide ou trop immature, je m'y complais pourtant à cette idée. Un rire m'échappe pendant qu'elle s'approche, et plus nous nous enfonçons dans la petite forêt, plus elle parait s'écrouler. « Tu sais, à cette cadence tu finiras vraiment par te perdre. » Croisant mes bras sur mon torse, je ne la vois que répondre par une vague grimace, je ne crois pas avoir vu un regard cinglant.

C'est une habitude à prendre, si je suis loin de la relation que je peux avoir avec ce frère qui n'est pas le mien par le sang, celle avec Ceri n'est pas explicable. Impossible, impensable. Je m'approche, je me recule, je rigole comme je peux à passer plusieurs minutes à détailler son visage sans m'en lasser. Différente parce qu'elle doit être de la haute, étrangère sans pour autant en être une, elle s'est adaptée à nos vies, malgré ses façons de parler qui peuvent paraitre étranges aux yeux du trio Reilly. Je ne peux la blâmer, ni lui dire d'arrêter de parler de façon si soutenue, si bien prononcée, après tout, moi-même j'ai été, durant un temps fils d'une famille dévorée directement aux entrailles. Des cendres, une odeur de putréfaction. Comme à l'état de mon coeur, qui se recompose avec du temps, beaucoup de temps et l'affection que je porte à mes compagnons de route. Pinçant ma lèvre inférieure, nos pas se font entendre dans la neige, c'est une sensation unique qui j'avoue, ne fait qu’agrandir mon sourire. Il en faut peu pour un bambin pour qu'il devienne heureux du jour au lendemain, pour faire sécher ses larmes. Plus jeune, je préférais à me jeter dans la neige que d'avoir de beaux vêtements ou de lire une belle histoire avant de me coucher. Haussement de sourcils, et notre intrépide aventure continue, dans un silence solennel. Concentré sur les sons, sur les dires des bestiaux qui peuplent cet endroit, c'est avec surprise que je constate qu'ils ne veulent à montrer leurs truffes en ce jour. Même durant cette saison ils sont visibles, je suppose qu'ils doivent se douter que je ne suis pas seule, où est-ce Ceri loin de l'exploit des pas de loups qui arrive à les faire fuir. Hypothèse à garder, à redire un jour quand l'envie me prendra, quand je voudrais faire froncer ses deux sourcils et son petit nez. Me préparant presque à hurler à l'abandon, à lui dire que tout est peine perdue et qu'il vaut mieux s'arrêter en attendant qu'ils viennent à nous, mes yeux se plissent. Ni une forme étrange, ni une personne au sol, tout ceci se veut bien mieux, mystique à sa manière. Des ruines, mais pas de celles qui peuvent laisser de glace. Non, celles-ci sont particulières à cause de cette légende qui tourne autour. Avec hâte de je m'y approche, et me retrouve à lever la tête vers cette immensité, un peu plus et ciel étoilé serait visible dans mon regard. J'y repense à cette histoire, longue qui faisait pleurer quiconque quand il était plus jeune. Quatre frères, un avide de pouvoir ne voulant partager, un ours, une montagne. La dévastation. Mor'du est le chant de la guerre, de la peur, de l'horreur. Resserrant un peu ma main autour de mon arc, j'ajoute tout en faignant une brève hilarité sèche en coin de lèvres. « Il parait que la bête qui jadis habitait ici, s'est mise à attaquer le domaine des DunBroch alors que tout était parfait pour prétendre à une paix. » Sans trop comprendre mes gestes, ma main se glisse sur une pierre, qui m'arrache d'ailleurs un frisson. « Tu y crois, toi ? » L'on parle d'un tableau géant, du désir de l'ours qui veut à voir notre reine mourir. Possible, impossible, nous n'avons été présents pour admirer les funérailles des victimes, et bien du petit peuple se pose cette question : sommes-nous encore en sécurité ? Si mon envie de départ était de courir après un cerf, lui planter une flèche entre les deux yeux, maintenant, je ne sais même plus pourquoi nous sommes allés ici. Pour les trouver surement. A nouveau mes prunelles se posent sur Ceri. Inlassablement je la contemple, ses reflets blancs ne laissent qu'à voir ses cheveux rappelant les corbeaux, ses yeux signe d'une liberté sans limites.


Dernière édition par Keith Lumsden le Sam 11 Mai - 19:01, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: on se trimbale nos cœurs comme des boulets de chair. (ceridwen)   on se trimbale nos cœurs comme des boulets de chair. (ceridwen) EmptyDim 21 Avr - 16:47

Le soleil est froid aujourd'hui, à tel point qu'il en fait craquer le sol sous nos pieds, et chanter la neige à chacun de nos pas. Immuable, l'étendue de velours blanc qui recouvre le monde n'en demeure pas moins fragile, et chaque crissement me rappelle à quel point nous ne sommes rien, pauvres petits corps perdus dans cet univers sans couleur. Il aura suffi de quelques heures, à peine une nuit, pour transformer ce paysage que nous pensions connaître, pour le subjuguer à tel point qu'aujourd'hui, il semble en tout point différent de ce que nous avions pu en voir la veille. De la neige, des flocons, à perte de vue, et à n'en plus finir. L'Hiver est là et, avec lui, les températures loin d'être clémentes en cette rude saison. L'eau n'ondule plus, les feuilles ne volent plus et, silencieusement, le vent s'est vu se faire accompagner d'une multitudes de particules immaculées, tout juste bonnes à virevolter de part en part du ciel, pour venir s'échouer sur chaque corps ou objet qui peuple ces immenses terres. Si mes yeux d'enfant pouvaient s'émerveiller des heures durant sur ces petites fleurs sans vie tombant du ciel, aujourd'hui bien des choses ont changé et, avec elle, la fascination s'est vue devenir appréhension, glissant sans but vers la voie de la douleur silencieuse. Vicieux, le froid s'insinue dans chaque parcelle de peau laissée à l'abandon, et les flocons n'en peuvent plus de se poser sur ma tête, mes bras, mes mains, recouvrant tout mon être de leurs reflets fugaces. Recouverte de cette cape sombre qui ne me quitte plus depuis des mois maintenant, je ferais presque pâle figure aux côtés de Keith, et de ses multiples couches de fourrure. J'aurais pu être dubitative en le voyant vêtu de telle façon mais, à présent, loin de moi l'idée de douter de sa façon d'évoluer en pareil habitat. Agile, il le reste tout autant, et ses vêtements semblent à peine entraver sa marche, bien plus maîtrisée et assurée que la mienne. Il avance, il court, saute de ci et de là, s'arrête, et chacun de ses regards, loin pourtant d'être mauvais, marque un peu plus la distance qui s'agrandit pernicieusement entre nos deux corps. Je traîne, sans même le vouloir. Plus habituée à monter des escaliers qu'à escalader des montagnes, évoluer aussi longtemps dans cette forêt enneigée est un challenge auquel je ne peux, ni ne veux, me résoudre. Marcher, continuer, ne s'arrêter pour rien au monde, à quand bien même mes jambes hurleraient à l'agonie. Loin de porter encore parures et vêtements brodés, cette épopée cruelle me montre combien je suis passée à côté de bien des choses essentielles, pendant toutes ces années. A quoi bon s'évertuer à suivre une route déjà toute tracée, sur laquelle je n'ai ni choix, ni pouvoir ? Ici, dans cette neige, ses côtés, je peux goûter à un semblant de liberté. Des routes, il n'y en a plus - et ce chemin aléatoire que nous empruntons, nous le dessinons jour après jour. La vie de bohème possède une saveur qui, lorsque j'y pense, coule en moi comme si rien ne pouvait l'en empêcher. Douce, elle m'offre bien des aventures auxquelles je n'aurais jamais songé penser, des histoires que je n'aurais jamais pu imaginer, une vie que je n'aurais jamais osé vivre - mais amère, elle m'arrache le plus indélicat des frissons, inscrivant sans relâche dans ma chair et dans mon sang combien je n'appartiens pas à ce monde dans lequel je me perds. Soufflant à cette pensée, je m'arrête, mes pieds glissant contre la neige trop lisse avant de me laisser une chance de me stabiliser. Un regard lancé aux alentours suffit à m'apprendre qu'il n'y a que nous en ces terres, et qu'aucun animal n'est assez idiot pour se risquer à sortir le museau de sa tanière. Comment chasser alors la bête qui refuse de se montrer ? J'imagine que c'est pour cela que nous continuons à avancer, que nous marchons sans relâche vers une direction qui m'est encore inconnue. De nous deux, je suis bien loin d'être la meilleure chasseresse et, loin de lui arriver à la cheville, je débusquerais à peine un lapin sous ce manteau de velours. Pourtant, Keith s'évertue à vouloir m'apprendre ce que je ne sais pas, à me faire découvrir ce que je ne connais pas. Hier la lecture du vent, aujourd'hui la chasse - de quoi sera donc fait demain ? Quittant les troncs parsemés de neige qui nous encerclent, mon regard en vient à se poser de nouveau sur cette silhouette englobant toujours ce mystère complet que je ne parviens à percer. Un nom, un regard, et mon coeur ne peut s'empêcher de battre un peu plus fort lorsque mon regard croise le sien. Près de lui, j'en viens à vouloir oublier totalement ce passé qui me suit sans relâche, à couper court avec ces instants douloureux qui ont fait de moi celle que je suis aujourd'hui. Effacer, oublier, croire, renaître, en serais-je un jour capable ? Il est coutume de dire que le passé finit toujours par nous rattraper, tôt ou tard. A n'en point douter, il surgira sans prévenir, le jour où je m'y attendrais le moins. Mais, si je puis tenir sa main en ce jour, j'ose espérer qu'il causera bien moins de dégât qu'il ne devrait.

Quelques foulées suffisent à peine à me faire gagner cette distance que j'ai lourdement perdue et, gardant le cap, je reprends ma marche de plus belle, tachant d'éviter les branches et racines vicieuses dissimulées sous la neige. Des crissements, le souffle court de ma respiration attaquée par le froid, les multiples bruits de la forêt me paraîtraient presque atténués derrière ce rideau de fatigue qui me prend petit à petit au corps. Est-ce par fierté que je n'ose abandonner - ou par envie, tout simplement ? Les deux peuvent se mêler, je n'en demeure pas moins courageuse dans cette adversité que j'ai bien du mal à vaincre. Vouloir apprendre à chasser à une lady, l'emmener vaincre la neige et le froid sans autre compagnie que celle d'une cape et d'un vagabond - intérieurement, je verrais presque l'expression outrée et profondément fâchée de Père, s'il me voyait voguer de la sorte dans cette forêt dont le nom m'échappe. Viendrait-il me chercher de lui-même, ou se contenterait-il d'attendre que mes jambes me lâchent, pour me prouver que je n'appartiens pas à ces gens ? Bien des jours j'ai redouté de voir un cavalier portant ses couleurs surgir dans mon dos, et m'arracher de cette nouvelle vie, bien des nuits j'ai rêvé de cette main attrapant sans ménagement mon bras, et me tirant vers cette prison que j'avais osé fuir, et puis le temps a fait son oeuvre, lentement, me faisant presque oublier que ce quotidien est une chimère que je me construis jour après jour, un rêve dont je ne veux m'éveiller. Le rire chantant de Keith cogne contre les arbres, parvenant à mes oreilles sans que je puisse l'en empêcher. Relevant la tête vers l'origine de cette voix qui ne me quitte plus, je croise sans difficultés ses prunelles qui m'observent, alors que mes pas continuent de me guider vers sa personne. « Tu sais, à cette cadence tu finiras vraiment par te perdre. » Un froncement de sourcils, des yeux qui se lèvent quelque peu vers ce ciel que nous ne pouvons voir - que puis-je répondre à cela ? Il a entièrement raison, et prétendre le contraire serait mentir. Je ne connais ni ces lieux, ni même le chemin que nous avons emprunté et, même si j'ai pu survivre bien des jours en forêt, je me vois mal tracer de nouveau ma route en solitaire, surtout pas en cette saison. Sans chercher à lui répondre, je continue d'avancer, sans dire un mot, sans parole et sans relâche, comme s'il n'y avait plus rien d'autre à faire, enfermé dans cette forêt. S'il est toujours question de chasse en cette journée, je l'ignore mais, petit à petit, l'impression de faire l'objet d'une toute autre rencontre commence à s'immiscer dans mon esprit. La neige intemporelle n'est qu'une invitée en ces terres du Nord et, sensiblement, je ne redeviens que l'étrangère que je suis. Devant nous commence à se dresser des ruines que je connais sans même les avoir vraiment vues, que j'ai déjà visité sans pourtant y avoir déjà posé le pieds. Des ruines gorgées d'histoire, cachant un passé à côté duquel je suis bien peu de chose, détentrices d'un secret aussi douloureux que véridiques. A présent, je devine l'endroit où nous sommes et, avec lui, le domaine dans lequel nous marchons. Il n'est ni question de laird, ni de règles de bienséance en ces lieux ; simplement d'un silence respectueux dont nous faisons l'objet sans nous en rendre comte, et de l'impression de pénétrer en des terres sacrées.

La neige continue à tomber doucement sans se soucier plus de nos corps, alors que nous nous avancons vers cette bâtisse détruite, chacun à notre vitesse. Keith s'élance déjà vers ces pierres sombres alors que je m'approche seulement de quelques mètres, laissant mon regard se perdre sur cette construction abandonnée par la main de l'homme. Courant sur nos lèvres silencieuses, il est ce nom que nous n'osons prononcer, et que pourtant je me surprends à murmurer sans réellement y prêter attention. Mor'du, son histoire, sa légende que chacun connaît, ou que chacun a du moins déjà entendu au moins une fois dans sa vie. Une famille, unie, quatre frères, une avidité dévorante chez l'un deux, et sans le vouloir, j'en viens à faire le parallèle avec ces quatre frères qui sont les miens, malgré tout ce que j'en pense et les épreuves qui nous ont éloignés. Pêcher parmi les pêchers, source de souffrance et de douleur, Fionnlagh pourrait-il un jour devenir le légitime successeur de Mor'du, tant il se serait laissé dévorer par la rage et la cupidité ? Un frisson me secoue les épaules à cette pensée, tant j'imagine aisément ses traits se tordre pour devenir ceux d'une bête sans âme et sans répit. Portant ma main vers mon visage pour chasser les quelques mèches qui s'y sont glissés, je laisse mes pas couler sur les pierres rongées tant par le froid que par le temps, et la forêt n'est plus qu'un souvenir dans notre dos. « Il parait que la bête qui jadis habitait ici, s'est mise à attaquer le domaine des DunBroch alors que tout était parfait pour prétendre à une paix. » Haussant légèrement les sourcils, mon visage se tourne vers Keith, dont le rire s'est évanoui aussi vite qu'il s'est levé. Comment prétendre à une paix en de pareilles conditions ? Si derechef cette question m'assaille l'esprit, l'inquiétude de savoir ma famille présente lors de cet évènement me tord l'estomac, plus douloureusement que je ne l'aurais souhaité. Si telle était réellement la nature de l'évènement, j'imagine sans peine que chacun des chefs de clan fut invité à parlementer autour d'une quelconque paix et que, pour un bien ou pour un mal, Père eut sitôt fait de s'y rendre. Lequel de mes frères l'aurait accompagné dans sa besogne ? Fionnlagh, Ivarr ? Mes yeux se baissent en pensant à Amlaidh, jouissant de son rôle de conseiller. Combien de morts, combien de personnes ont pu survivre à l'attaque de Mor'du, si la bête s'est bel et bien rendue sur place ? Faire face à leurs dépouilles aurait été le plus douloureux des calvaires, mais demeurer dans l'ignorance s'avère pire sous bien des angles. « Tu y crois, toi ? » A nouveau sa question, et à nouveau le silence. Que croire, que penser, lorsque l'invraisemblable tend à revêtir les aspects d'une certitude qui nous dépasse ? Reculant d'un pas, mes yeux se perdent contre la multitude de pierres qui soutient cet endroit délabré, et je peine à relever les yeux vers les siens, tant j'appréhende ce qu'il pourrait y lire. « J'imagine que les seules personnes ne pouvant refuser d'y croire sont celles qui se sont retrouvées tête à tête avec la bête, sans le vouloir... » Plus une remarque personnelle qu'une quelconque réponse censée à sa question, et le silence chatouille de nouveau mes oreilles, me faisant presque oublier tous ces mots que j'aurais pu lui dire. Il est de ces paroles que je n'ose prononcer, de ces idées que je n'ose penser et, traversant chacune de mes tentatives d'avance perdues, il en est de cette peur qui me serre doucement l'estomac, de cette appréhension qui le ferait deviner ce passé que je n'ose dévoiler. Montrer trop d'intérêt et d'inquiétude envers cette funeste annonce reviendrait à annoncer clairement mes origines, à quand bien même il s'en douterait déjà. Énoncer un fait, agiter le voile d'une vérité loin d'être assumée, et tout cela ne serait d'ouvrir la porte à de bien nombreuses questions auxquelles je ne puis répondre. D'où viens-tu ? Quel est vraiment ton nom ? L'oubli est un luxe que je ne peux m'offrir, mais tourner le dos à cette vie est un choix que je continue de faire jour après jour, même si celui-ci revient à me faire mentir à ceux que je côtoie. Une part de ma confiance s'est placée d'elle-même dans les mains de cet homme que j'accompagne et, pour autant, je suis bien incapable de lui dire tout ce que je devrais. Il y a toujours cette part d'ombre qui m'éreinte et m'enserre, ces fers que je n'arrive à retirer de mes poignet malgré mon insistance, et il en est de même pour le pouvoir de Père, qui continue d'agir sur moi malgré l'éloignement. Un bref soupir, et je me surprends à tourner légèrement sur moi-même, pour ne plus lui présenter que mon dos, à mesure que les mots glissent hors de mes lèvres. « Ne dit-on pas que chaque légende possède son fond de vérité ? Bien longtemps j'ai cru à cette légende, bien longtemps je me suis laissée bercer par cette histoire déchirante, pour en venir à être obligée de l'oublier au fil du temps, à la laisser reposer dans un coin de mon esprit... Mais j'avoue qu'aujourd'hui... je ne sais plus que croire ou penser... » Une complainte malhabile, envers le passé, envers le présent, envers cette horreur qui arrache leurs rêves aux enfants, et qui les fait grandir un peu trop vite. Mon enfance a beau s'être déroulée comme celle de n'importe quel autre enfant, je n'en garde qu'un souvenir doux-amer, la plupart de mes souvenirs n'en ressortant que plus ternes. Plutôt que des sourires, je n'en retiens que les larmes, et cette souffrance indicible qui coule encore dans mes veines aujourd'hui. Levant la tête vers un ciel voilà, je sens quelques flocons tomber sur le bout de mon nez, d'autres sur mes cils et, subrepticement, le cligne plusieurs fois pour les en chasser, finissant par fermer les yeux, pour profiter quelques courts instants de cette neige sans âme. Si le vent fait danser ces microscopes bouts de ciel, il continue d'agiter sans relâche les feuilles et branches qui nous entourent de près ou de loin, et quelques instants, je rêve de pouvoir toucher du doigt cette insouciance qui fait virevolter ce petit monde. La réalité se veut bien plus traître en comparaison et, à cette pensée, une bourrasque vient à balayer cet instant de paix, soulevant ma cape pour me faire frissonner plus que de raison. Rouvrant les yeux vers cette morte bâtisse qui nous tient compagnie, je ne peux qu'être témoin de la mélancolie qui peint ces innombrables pierres, de cette morosité cruelle qui s'allonge entre chaque lourde dalle. Si cet endroit est inhabité, il n'en demeure pas moins quelque part maudit, et l'idée de s'avancer entre ces murs détruits me pétrifie de l'intérieur. Bien nombreux sont les avertissements courant sur le dos de la bête qui est supposée y vivre et, parmi ceux-là, celui que chaque enfant connaît par coeur. Jamais, ô grand jamais, il ne faut s'approcher de la demeure de Mor'Du. « Et toi, Keith ? » Une apostrophe, lancée comme un flocon de neige sur un lac gelé. Mes yeux se baissent de nouveau, mon visage se tourne vers le sien que j'ai abandonné quelques secondes auparavant. Une seconde, un soubresaut, un soupir, et puis la suite, sans surprise. « En quoi crois-tu ? » Mes yeux cherchent les siens, mon coeur bat contre ma poitrine, de peur ou d'émotion, je ne saurais le dire. Si la croyance est l'apanage des pauvres, alors je suis de celles qui préfèrent jeter leur fortune plutôt que de vivre dans un univers régi par des principes trop réguliers, à quand bien même cela ne ferait que causer ma propre perte.
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BURN. BURN. BURN.
On prend un enfant de deux ou trois ans, on le met dans un vase de porcelaine plus ou moins bizarre, sans couvercle et sans fond, pour que la tête et les pieds passent. Le jour on tient ce vase debout, la nuit on le couche pour que l’enfant puisse dormir. L’enfant grossit ainsi sans grandir, emplissant de sa chair comprimée et de ses os tordus les bossages du vase. Cette croissance en bouteille dure plusieurs années. A un moment donné, elle est irrémédiable.

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MessageSujet: Re: on se trimbale nos cœurs comme des boulets de chair. (ceridwen)   on se trimbale nos cœurs comme des boulets de chair. (ceridwen) EmptyVen 31 Mai - 20:06

Le vent de l'hiver me traverse doucement les oreilles, se glisse sous ma peau, sous ma chaire pour m'offrir la sensation d'un frisson quelconque dans le creux du cou. C'est admiratif que mes yeux continuent à regarder la bâtisse déjà morte depuis maintes lunes, maintes années. Plus je la regarde, plus je me rappelle de ces souvenirs lointain. De la torche allumée dans un couloir sinueux, d'un sourire, d'un rire cristallin et d'une histoire bordant quelconque enfant qui voudra bien y croire ne serait-ce qu'un peu. Si je ne suis capable de m'attacher à ce Dieu tout puissant qui nous surveille de là-haut, sur qui puis-je me reposer ? Des esprits dans la forêt ? Je ne suis pas assez dupe, pas assez crédule pour m'y laisser glisser sans demander une aide hasardeuse. Je déambule sans réel but, m'attachant à ce qui peut faire battre mon coeur rien qu'un peu plus. Si la grande famille de bohémiens en fait partie, les légendes restent et resteront à jamais un sujet qui me colle à la peau, qui me suit et s'attache à mes pas. Difficile de s'en détacher, difficile de s'en dépêtrer. Comme un boulet aussi lourd pour nous faire couler, j'accepte l'idée que bien des personnes puissent à me rendre pour un aliéné. Bien heureux ceux qui ne se doutent pas de ce qui trône au dessus, qui ne cherchent pas aussi loin que les ordres le veulent, qui s'arrêtent aux moments simples de la vie. Comme hurler sur un frère, se battre avec un bâton de bois, essayer tant bien que mal de faire un feu râleur, chasser une bête et perdre lamentablement sa piste. Si durant un temps il m'arrivait à envier ceux qui peuvent à se vanter d'avoir un lit douillet en hiver, j'ai quelque chose qu'ils n'ont pas. Quel noble peut dire qu'il a épousé quelqu'un par amour ? Quel noble peut dire n'avoir jamais vu les pires horreurs ? Lequel ? Bien rares, si ce n'est inexistants, il en reste bien peu de ceux qui osent à se lever. Encore faut-il seulement avoir le courage, et surtout des envies plus que macabres. Un titre, une épée, un arc, une armure flamboyante face au soleil se levant, une attitude plus que respectable et pourtant, un jour, l'herbe vient à rougir. Mourir en grand homme, en héros. Je n'en suis pas un, je ne suis pas comme eux. Alors qui suis-je donc ? Seulement un nom qu'il va falloir à graver sur une épitaphe perdue dans une forêt, seulement un murmure dans le creux d'un arbre, une sensation sûrement désagréable dans le fin fond de la gorge. Disparaitre parait un mot bien lointain quand on veut à l'écouter, pourtant si près, il se cache entre les feuilles, entre les pierres et n'attends qu'une chose, attraper nos jambes. Nous faire périr à jamais. Resserrant un peu plus les vêtements qui me tiennent chaud, mes sourcils se froncent. C'est étrangement que l'endroit parait plus féérique que témoin d'horreurs d'un homme qui, rongé par l'égoïsme s'est laissé tenter par une sorcière aux yeux rieurs. Le sang a coulé pourtant, les cris se sont dissipés sur les torches, ont fait frémir les voyageurs dans toute l’Écosse. Cette femme recherchée dans sa chaumière aux reflets bruns, elle n'a jamais été retrouvée. Serait-elle maintenant autre que ce qu'elle prétendait être ? C'est avec un sourire plus que sincère que j'imagine le nouveau visage de la peur. La famille, les compagnons, les animaux, out tout simplement, ceux qui poussent à être intrigués. Pinçant ma lèvre inférieure, c'est un regard posé sur mon interlocutrice. Un passé sans aucune image, un présent bien brouillard et sûrement un futur non préconisé, non proposé. Elle n'est pas d'ici, elle n'est pas comme celles qui se relèvent sans rechigner, qui crachent des injures aussi dégoutantes que l'état de leurs vêtements. Ceri, seras-tu celle qui causera ma perte ? A en juger par les battements maladroit d'un coeur sans vergogne pour ma tête qui souhaiterait enfin cesser de penser, elle sera liée à mes autres journées, mes autres heures, mon autre vie. Sûrement à mes peines comme à mes joies, à mes sourires comme à mes soupirs. « J'imagine que les seules personnes ne pouvant refuser d'y croire sont celles qui se sont retrouvées tête à tête avec la bête, sans le vouloir... » Que voir, qui croire en ce bas monde où tout est bon à la trahison ? Je suppose que seul le petit peuple peut dire haut et fort qu'il ne laissera pour rien au monde son prochain - si ce n'est une petite bourse pleine, mais il en est des filous, et non pas de ceux qui connaissent la définition d'une famille. C'est un remplacement qui doucement s'est fait, qui m'a attaqué, puis m'a dorloté entre ses grands bras. Si à ces jours j'aime à dire que je suis un Reilly dans ma totalité, les rêves pourtant persistent à me faire me lever dans les nuits perdues. La lune bavarde avec les étoiles, le ciel noir réveille mes plaies qui saignantes ne seront jamais complètement oubliées. C'est infaisable. Outre d'avoir eu droit à un coup sur la tête, ne plus savoir son propre nom, la raison de sa venue sur cette terre, sur cet endroit. Je regretterais pourtant de ne plus reconnaitre ces visages familiers. La voix un peu criarde d'Arran, les plaintes de Senga, les phrases maladroites de Greer et surtout, surtout, le visage apaisé de cette femme sans histoire comme elle tente à le faire comprendre. Les doutes persistent, si je ne suis pas comme la mère de famille à vouloir savoir sans aucun détour, j'aime à me dire qu'une approche plus fine aidera à ouvrir la porte qui mène directement à son âme. Au fond, tout au fond, là où rêve et réalité ne sont plus de mise. Là où seuls les secrets marmonnent quelques mots qui se révèlent être des clefs. Les siennes doivent être rouillées, cachées sous un arbre qui souffre, pleure, meurt un peu plus chaque jour. Sommes-nous les partisans d'une quelconque reconstruction ? Sommes-nous les uniques à pouvoir voir une transformation par rapport à ce qu'elle pouvait être ? Qui était-elle ? Que voulait-elle ? Et surtout, ce pourquoi qui reste en suspend au dessus de nos pauvres têtes. Une femme détestable ? Ignoble ? Traîtresse ? Ou au contraire telle qu'elle est maintenant ? Fille d'un grand homme ou d'un personnage plus modeste ? Mariée, mère ou promise ? Des questionnements. Des réponses soufflées que je n'arrive pas à entendre. Le mensonge dans ces cas-là, s'avère le plus salvateur pour continuer à avancer, pour poser ses pieds dans la neige, pour tendre une main dans les airs.

uc. :puppy:
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